vendredi 5 mai 2017

Un souffle après l’autre

Il y a des moments dans l’existence où les malheurs nous tombent dessus sans répit. Après le décès de mon père, puis celui de mon compagnon, voici que ma chère petite maman a elle aussi choisi de tirer sa révérence et les jours qui lui restent à vivre sont comptés. 

J’ose à peine dire qu’encore une fois je suis confrontée à la perte d’un proche.
« Encore ! ? »
Oui, encore… 

Et la question qui suit, « Mais comment fais-tu pour tenir le coup ? ». Et là, plus que jamais,  je vois comment  la pratique de la méditation m’aide à traverser cette nouvelle épreuve. 

Quand on pratique, on s’entraîne à vivre un moment après l’autre. Quand le moment est difficile, la tendance que nous avons, c’est de ne pas l’accepter; on en fait une histoire, on cherche des coupables, on se révolte contre le sort injuste qui nous tombe dessus,  on cherche des explications, une loi des séries,  des raisons… 

La pratique nous apprend, en étant attentif à notre souffle, à être dans le présent, dans notre corps, dans le corps même du moment, et par cette présence attentive, à coïncider exactement avec ce qu’il y a vivre sur le champ. 

Dans la situation que je traverse, je mesure toute la puissance de cette pratique. Suivre le mouvement du souffle, c’est suivre le mouvement de la vie qui vient, mais  aussi celui de la vie qui s’en va. Elle vient et elle va en dehors de toute volonté de notre part, elle nous dépasse complètement, et cette  nouvelle épreuve me fait entrevoir l’immensité indomptable et splendide de cette vie qui ne se laisse pas ramener à la mesure de notre petite existence, et qui en même temps est là, si fragile, dans une fleur, un iris bleu comme il en fleurit dans le jardin de ma mère.

Dominique Sauthier
Genève
« Merci d’être, sans jamais te casser, iris, ma fleur de gravité. Tu élèves au bord des eaux des affections miraculeuses, tu ne pèses pas sur les mourants que tu veilles, tu éteins les plaies su lesquelles le temps n’a pas d’action, tu ne conduis pas à une maison consternante, tu permets que toutes les fenêtres reflétées ne fassent qu’un seul visage de passion, tu accompagnes le retour du jour sur les vertes avenues libres. »

René Char, Lettera amorosa, illustré par Georges Braque

6 commentaires:

  1. Merci chère Dominique pour tes paroles précieuses et tellement belles et vraies qui résonnent en mon cœur!
    Je t'envoie toute ma tendresse et mes chaleureuses pensées pour cette nouvelles épreuve que tu traverses Muriel

    RépondreSupprimer
  2. Merci Muriel, tes encouragements me vont droit au coeur. La pratique est une aide formidable, et les liens aussi !
    Dominique Sauthier

    RépondreSupprimer
  3. Chère Dominique, tes propos sont eux mêmes des "fleurs de gravité". Ils pèsent sans peser. Ils ont un poids qui ne nous casse pas. Un poids qui nous élève. Ils éteignent les plaies et recueillent la vie. Tu es la preuve vivante que la pratique peut nous maintenir debout contre tous les coups du sort même quand ils sont à répétition. Que la force et la tendresse ne cessent de t'habiter !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Chère Marie-Noële,
      Ton commentaire me touche beaucoup. J'espère en effet que mes témoignages permettent de rendre la pratique plus réelle, et par là plus aidante pour tous ceux qui traversent des épreuves. Personne n'est épargné, nous passons tous par des moments difficiles, mais la pratique donne une profondeur à nos douleurs qui nous grandit.
      Dominique Sauthier

      Supprimer
  4. Oui Dominique, cent fois oui ! Tes témoignages sont très précieux, ils le sont, infiniment. Prends bien soin de toi, toute très grande que tu es, Catherine

    RépondreSupprimer
  5. Oui, prendre soin de soi, chère Catherine, et ne pas oublier que la pratique, c'est justement prendre soin de soi, écouter cette tristesse, ou peut-être même cette lassitude, ou cette révolte, qui sont là. Ecouter toutes ces émotions, pour éviter qu'elles ne me cassent. Tu connais la fable du roseau et du chêne. Accepter que les bourrasques nous fassent ployer plutôt que leur résister.
    Dominique Sauthier

    RépondreSupprimer

Nous répondons systématiquement à vos commentaires et questions.