jeudi 30 mars 2017

La joie profonde de former une communauté de silence

Poliakoff - composition abstraite 1968.
Il y a trois semaines, un dimanche, Paris était ensoleillé - le printemps s’annonçait  indéniablement. 

Pour  quitter ce bon soleil et m’engouffrer dans l’escalier raide qui monte à la salle de la Prudentielle, il me fallait un peu de courage.  

Le dimanche après-midi les coussins sont disposés autrement, il y a de l’espace entre chaque tapis/coussin  et le tout forme un demi-cercle. C’est aéré. Je prends place, tout cet espace autour, j’ai l’impression d’être sur une embarcation, mes voisins de même, chacun semble prêt pour naviguer. 

Mais nous sommes sur la terre ferme, les embarcations ne voguent pas. Nous sommes invités à disposer notre corps et à laisser son poids se poser vraiment.

J’aime prendre cette posture - elle m’est familière puisque je m’entraîne régulièrement.
Mes yeux ouverts voient. A ma droite devant de l’orange vif, du noir et du turquoise, une main gauche de femme, un bracelet scintillant, loin devant un chemisier bouffant de couleur crème et du noir et du rouge vif, à ma gauche,  du bleu profond et du bleu clair et une main droite de jeune homme - mon regard n’est pas bavard, c’est simplement mon champ de vision - ce que je vois est magnifique. 

Des stèles vivants autour de moi, non pas des installations permanentes mais des stèles se dressant à la faveur du temps. 

J’avais oublié cette joie profonde d’être ensemble, de former cette communauté de silence.

Fabrice Midal, dans son livre Etre au monde parlant  du sens politique des tragédies commandées à l’époque de Périclès, écrit  : «  Ne pourrions-nous pas imaginer que le fait de pratiquer permette, sous un autre registre, de vivre cette expérience politique d’être ensemble de manière profondément gratuite, dans l’épreuve de notre humanité commune ?
J’ai eu le sentiment en guidant les pratiques de plusieurs centaines de personnes de faire une telle expérience »

Mon expérience de la pratique de ce dimanche après-midi là, je la qualifierais volontiers de politique. 

Elisabeth Larivière
Paris

1 commentaire:

  1. A la fois superbe et émouvant... comme une véritable expérience
    Merci Elisabeth !

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