jeudi 30 juin 2016

L’union de tous les contraires

Tombée en arrêt  sur cette profonde et poétique réflexion écrite le 9 décembre 1904 par C.F. Ramuz dans son Journal ; il avait alors 25 ans :

« Quand je suis triste, la pensée de la mort m’obsède péniblement. Quand je suis heureux, elle m’est légère. Je sens alors qu’elle est la source même de toute beauté, à vrai dire la mesure de tout. Je dis : Je m’en irai à mon heure, sans me plaindre; j’obéirai comme la plante - cette pente m’est douce et je m’y laisse aller. Portez-moi avec les nuages et les bateaux sur la mer. O poussière des prés, ma sœur, sources, parfums, ô vous âmes des pétales et le chant de l’oiseau, voici que je connais par delà toute limite l’union de tous les contraires et le repos dans le mouvement. »
 
Méditer, c’est peut-être faire confiance comme la plante, n’opposer aucune résistance, se poser dans le mouvement même de la vie et se laisser toucher par son secret le plus intime.

Dominique Sauthier
Genève

mercredi 29 juin 2016

Comment sortir de la prison de l’uniformité ?

Dans la peau de John Malkovitch, un film de Charlie Kaufman.
Le psychanalyste Pierre Legendre définit avec justesse l’uniformité de notre monde nous rendant de plus en plus inhumain et identique les uns aux autres alors que nous revendiquons paradoxalement une plus grande liberté :

« L’individualisme programmé qui désarrime chacun du fondement de ses liens, ouvre sur les enfers subjectifs. A grande échelle désormais, nos sociétés sautillantes mais désemparées fabriquent le masque de ceux, innombrables, qui font semblant de vivre. »
Pierre Legendre, Les collages qui font un état

Cette citation est marquante.
Elle me renvoie à mon propre enfermement d’il y a quelques années où j’étais pris dans un rapport égotique à moi-même ; sous emprise  d’un certain discours psychologique : le syndrome du petit être sur son île qui interprète tout à partir de lui-même. Le Moi, moi-même et encore moi est entièrement solidifié à travers cette perspective.

Depuis que je pratique la méditation, j’ai appris à cultiver un rapport beaucoup plus ouvert à ce qui m’arrive, me libérant peu à peu du carcan des concepts pour regarder la réalité de mon expérience à partir d’une non séparation entre mon corps et mon esprit, entre le dedans et le dehors, entre moi et les autres…

Quel soulagement de s’ouvrir ainsi à l’ampleur de notre existence. 
Notre vie peut alors être bien plus vaste que la petite image solidifiée que nous avons de nous-mêmes. 

Mathieu Brégegère
Paris

mardi 28 juin 2016

L'éternité est composée d'instants présents

Pourquoi la méditation est-elle un chemin spirituel ?
Parce qu'elle nous fait découvrir l'essentiel de l'existence.

Comment ?
En nous apprenant à reconnaître, à apprécier et à prendre soin de l'instant présent. 

Et alors ?
L'instant présent est beaucoup plus vaste, précieux, surprenant et bon que tout ce que nous pourrions imaginer sur son compte.

La preuve ?
C'est Emily Dickinson qui la donne :
"L'éternité se compose d'instants présents"


Marie-Laurence Cattoire
Paris

samedi 25 juin 2016

Sentir, voir, regarder.

©Rembrandt au Musée du Louvre.
Maerten Soolmans et Oopjen Coppit ne sont pas un couple ordinaire. Ils ont été peints par Rembrandt en 1635  alors qu'il avait 28 ans. 
Si la vie les a séparés très tôt par la mort précoce de Maerten, leur union perdure  depuis 381 ans… 

Pour aller à leur rencontre - c'était in extremis car ils sont convoqués par la restauration - rien de mieux que d'y aller “en méditante”.

La rencontre espérée aura-t-elle lieu?  Je ne peux le savoir d'avance.  

Un effort est nécessaire pour me placer en sorte de pouvoir rester auprès d'eux un certain temps. C'est un effort physique et aussi un effort d'attention. Sentir, voir, regarder, m'en imprégner tout en étant présente à ma respiration.  

Ici, il me faut aussi du courage; supporter les bombardements photographiques,  ignorer d'envahissantes explications culturelles qui traitent Maerten et Oopjen  comme de simples objets.
 
Ensuite de la patience.
Il n'y a pas besoin de tout voir. Et même si je n'y voyais rien ce ne serait pas grave et ça ne voudrait pas dire que ce soit pour toujours. Je regarde la matérialité de l'œuvre - ici,  le rendu des soies, des satins et des tulles. Je peux me mettre tellement près du nœud de soulier qu'il se transforme en autre chose.
 
Mais surtout, comment me laisser regarder par ces peintures?
Comment entrer dans cet exercice spirituel auquel Fabrice Midal nous a invités plus d'une fois ?
Rester dans la bonne disposition, persévérer, attendre sans rien en attendre...

Puis, ensuite, retrouver le poète Robert Marteau. Rembrandt fait partie de ses "Huit peintres". Je "bois" ses paroles : 
" Le réél apparaît en se défaisant du voile de la réalité ... Ce réél ne surgit pas miraculeusement : il émerge peu à peu par attention soutenue à la réalité du monde, elle-même affublée des oripeaux de l'illusoire et du conventionnel. "

Elisabeth Larivière
Paris

vendredi 24 juin 2016

Se pencher vers la peur

Tara Brach enseigne la méditation aux Etats-Unis depuis plus de 30 ans parallèlement à sa carrière de psychologue clinicienne. Elle a développé un travail de pointe pour accompagner les patients victimes d’addictions et les aider à retrouver une véritable estime d’eux. 

Voici une très belle  citation relevée lors de ma récente lecture de son livre L'acceptation radicale, tout récemment publié en France :

« Décider de se pencher vers la peur et de l’accepter peut sembler paradoxal. Or c’est parce que la peur est partie intégrante de la vie qu’y résister revient à résister à la vie. L’habitude de l’évitement s’infiltre dans toutes les dimensions de notre existence : elle nous empêche d’aimer aussi bien que nous en sommes capable, elle nous retient d’adorer la beauté qui est en nous et autour de nous, elle nous défend d’être présent à chaque instant. C’est pourquoi l’acceptation radicale de la peur est à l’épicentre de notre éveil spirituel. »


Marie-Laurence Cattoire
Paris 

mercredi 22 juin 2016

Méditation et regard

Méditation guidée à Monumenta ©RMN.
J'ai eu la chance d'être invitée à participer à l’édition 2016 de Monumenta au Grand Palais. Au cours de ces trois soirées, j’ai proposé une visite à « deux voix »: des temps de méditation guidées ponctuent la visite guidée par une conférencière, pour faire l’expérience d’être pleinement présent, et ainsi de mieux s’ouvrir à l’œuvre, avec un regard différent. 

Dans la nef de cet imposant bâtiment historique j'ai ainsi pu expérimenter, une fois de plus, à quel point se disposer, dans un silence juste et bon, à mieux regarder, à mieux voir, à mieux sentir, est un cadeau à la portée de tous. S'asseoir quelques instants, prendre soin de toutes nos perceptions, s'ouvrir à la situation permet d'être plus vivant et plus ouvert à ce qui nous entoure... Et quand il s'agit d'œuvres d'art "monumentales" le plaisir est décuplé !

Voici le mail que j'ai reçu hier d'un des visiteurs :
"Vous avez réussi à nous amener à "faire l'expérience de l'expérience " avec une délicatesse remarquable;  je pense que sans vous nous serions passés complètement à coté !!! C'est une idée géniale que d'introduire la méditation au grand public par le biais de l'Art (et particulièrement l'Art contemporain). C'est vraiment prendre conscience de notre attachement à ce qui est connu et de s'en libérer  pour accueillir " autre chose " .  Cela change de la réaction habituelle « j’aime ou je n’aime pas » pour pouvoir entrer pleinement dans l'œuvre de l'artiste et peut-être, pourquoi pas… commencer à l'appliquer dans sa vie quotidienne…"

Monumenta existe depuis 2007. Chaque année des artistes contemporains de renommée internationale sont invités à concevoir une œuvre à la dimension de la nef du Grand Palais. Succédant à Anselm Kiefer, Richard Serra, Christian Boltanski, Anish Kapoor, Daniel Buren et Ilya et Emilia Kabakov, c’est Huang Yong Ping qui a relevé le défi cette année, pour la septième édition.

Clarisse Gardet
Paris

mardi 21 juin 2016

Le mandala, un portrait de l'esprit humain

Un mandala de Mondrian photographié au Musée Berardo de Lisboa.
Outre leur prix très accessible, les formats "poche" réservent parfois de grande surprises.
Ainsi le livre de Fabrice Midal, initialement paru sous le titre MANDALAS, dans une édition luxueuse au Seuil, est ressorti l'année dernière en format poche sous le titre "Petite philosophie des Mandalas, méditations sur la beauté du monde" épurée des images et reproductions présentes dans la version d'origine.
Ma surprise fût de redécouvrir entièrement ce texte, que j'avais pourtant lu à l'époque et de lui trouver une nouvelle force, une nouvelle fluidité, une nouvelle pureté.
Avec la première édition, qui est un livre d'art, j'étais affairée à scruter les images, à comprendre leurs relations entre elles ; Fabrice Midal fait un remarquable travail autour de diverses formes de mandalas, qu'ils soient bouddhistes, chrétiens – les rosaces de la cathédrale de Chartres – ou modernes – les œuvres de Mondrian ou de Pollock et, pour moi, le texte passait un peu en second plan, comme une explication des images données à voir.
En réalité ce texte est de tout premier plan pour découvrir en profondeur, et très simplement, ce qu'est un mandala, ce qu'est un monde, ce qu'est un être humain.
Page 48 "Le mandala est une prise en vue de l'entièreté de ce qui est – cette tasse, cette table, la maison, l'autoroute, les arbres, le chat, les passants…- pour dégager l'unité à partir de laquelle tout se coordonne. Le mandala nous aide ainsi à mieux appréhender la manière dont nous sommes au monde, dont nous le voyons, y agissons en le tonalisant."
et plus loin page 51 "Avant d'avoir un rôle liturgique ou d'être un mélange d'ordre et d'harmonie, le mandala est un portrait de l'esprit humain – un portrait qui révèle sa vérité profonde et son possible le plus haut."

Un très joli livre que je suis heureuse d'avoir eu l'occasion de redécouvrir et qui m'aide à porter un regard neuf sur ce qui m'entoure.

Marie-Laurence Cattoire
Paris

samedi 18 juin 2016

Se laver dans la rivière

"Quand on a mission d'éveiller, on commence par faire sa toilette dans la rivière. Le premier enchantement comme le premier saisissement sont pour soi. » René Char

Cette phrase de René Char dit quelque chose du geste de la méditation.

S’assoir, n’est-ce pas apprendre à retrouver cet émerveillement premier, celui qui précède toute préconception ou tout jugement ?
 
Il y a quelque chose de l’ordre de la purification dans cette pratique - comme dans la toilette dans la rivière - non pas entendue comme purification d’une faute quelconque, mais plutôt d’une habitude si ancrée de recouvrir la réalité de multiples couches qui en cachent la saveur originaire.

Si ce premier saisissement doit bien être pour soi, c’est qu’il y a à déciller d’abord ses propres yeux pour ensuite entrer en rapport avec le monde avec un œil neuf. N’est-ce pas si étonnant de découvrir en soi des émotions, des tonalités, encore jamais éprouvées alors que l’on pense souvent si bien se connaître ?

La magie de la pratique c’est aussi ne pas avoir pas peur d’entrer en rapport avec l’inconnu en soi.

Marine Manouvrier
Rixensart

vendredi 17 juin 2016

Apprendre à aimer

Peut-on apprendre à aimer ?
La question mérite d’être posée car c’est tellement étrange en effet. Nous pensons que l’amour, pour être sincère, doit être spontané, comme surgi de nulle part. Que nous n’y pouvons rien, soit nous aimons, soit nous n’aimons pas. 

La réalité est pourtant bien différente : un voisin peut vous être totalement indifférent et le jour où vous apprenez qu’il vient du même village que vous, qu’il est allé à la même école primaire avec la même institutrice, vous vous mettez à l’apprécier. Un client ou un collaborateur peut vous sembler extrêmement désagréable, hostile, et après avoir passé une soirée à discuter avec lui, à l’avoir découvert sous un autre jour parce qu’il vous aura parlé de sa famille ou de sa passion des voyages, vous le verrez tout à fait différemment.

Ainsi, la plupart du temps nous n’aimons pas, ne ne sommes pas reliés, à cause d’une ignorance et d’une indifférence ambiantes, un peu floues mais bien installées dans notre société.

La pratique de la méditation - et plus particulièrement celle de la bienveillance, est un entrainement à nous libérer de notre sentiment de séparation et à sentir de manière très concrète, très physique et très simple notre besoin d’aimer et d’être aimé. 
Nous réalisons alors qu’il en va de même pour tout le monde sans exception.

Le prochain stage de l'École pour découvrir et pratiquer l'Amour bienveillant sera donné du 30 septembre au 5 octobre prochains, en Normandie. Ouvert à tous ceux qui ont déjà suivi un stage de Pleine présence. Renseignements ici. 


Marie-Laurence Cattoire
Paris


jeudi 16 juin 2016

Rester mort c'est trahir la vie

C'est dans Suppôts et Supplications qu'on peut trouver, entre autres pépites, ce beau diamant du lapidaire Artaud – le grand poète agacé :Rester mort c'est trahir la vie

Est-il besoin d'un commentaire ? Combien de minutes et d'heures restons-nous morts par jour ? Enterrés sous les tonnes de grabat de nos préjugés, étouffés sous les matelas confortables de nos absences, écrabouillés par les mécanismes de notre quotidien, écartelés entre nos pesanteurs et notre légèreté... 

Demandons-nous plutôt combien de temps sommes-nous vivants par jour...

Au moins une quarantaine de minutes de mon côté. Sur un coussin rouge, jambes croisées. A ne rien faire que vivre – ou plutôt apprendre à vivre – la vie telle qu'elle respire lorsqu'on se redresse un peu vers elle. D'ailleurs les chats ne s'y trompent pas, qui viennent tous les matins méditer avec moi. Eux qui vivent leur vie toute la journée savent reconnaître quand j'approche la mienne.
 
Nous discutons peu – ces félins et moi – de ces questions existentielles, mais d'une certaine façon, m'asseyant pour pratiquer, j'ai parfois le sentiment de leur acquiescement. Comme s'ils me disaient : « Tu vois quand tu veux, tu arrives à ne plus les faire passer au premier plan – tes sacro-saintes réactions qui t'empoisonnent l'existence. A te regarder, cela n'apparaît ni agréable, ni désagréable de méditer. C'est. Avant tout, avec tout, c'est faire le chat dans son existence. La meilleure manière d'apprendre à être vivant que je connaisse – foi de mistigri. Miaou ! »

Yves Dallavalle
Chapendu

mercredi 15 juin 2016

Présent vivant

Paul Gadenne à Ustaritz en décembre 1955.
Invitée par un ami à relire un passage de Siloé de Paul Gadenne, je ne résiste pas à vous l'offrir en partage:

"La vie, la joie, le bonheur même, toutes ces choses mystérieuses, si fermées, étaient là ouvertes devant lui; et elles étaient résumées dans ces deux mots : être là... A quoi bon désormais aller plus loin, à quoi bon chercher autre chose, puisqu'il avait acquis cette certitude d'être là, qu'aucune autre forme de vie, en aucun autre temps, n'aurait pu lui donner davantage? ... Cette certitude, ce sentiment de la présence de l'être à lui-même, n'était-ce pas justement cela, la vie ?"

En pratiquant la méditation je m'entraîne à être là, en distinguant sans relâche l'absence de la présence. L'ennui, la fatigue, l'agitation me traversent mais, courageusement, je marque ce contraste, encore et encore. 

Petit à petit la méditation m'amène à reconnaître cette présence vive et à en goûter entièrement la texture. J'en fais l'expérience sur le coussin mais aussi en post-méditation. 

Quand au petit matin la Lune et - tout près d'elle - Vénus tardent à nous quitter, j'arrête le pas de course, je respire et le monde me dit comme il est vivant.

Marine Manouvrier
Bruxelles

lundi 13 juin 2016

Dans le creux des choses

Musée de l’Hermitage, Lausanne.
Vu une exposition de peintures de Marius Borgeaud. Rien de spectaculaire. Scènes d’intérieur à la Vallotton, vie quotidienne en Bretagne ;  personnages mal dessinés, perspective malmenée : est-ce de la maladresse feinte et du pittoresque ennuyeux ? Une imitation de Vallotton, son contemporain, et du Douanier Rousseau ? 
Au fur et à mesure que j’avance dans l’exposition, quelque chose commence à apparaître. Il devient évident que le peintre n’en a rien à faire du beau dessin et du beau sujet. 
Ce qu’il cherche à montrer se trouve ailleurs,  dans le creux des choses, dans ces moments de la vie de tous les jours que nous trouvons ennuyeux et sans intérêt. Je regarde ces tableaux, et ce qui me frappe c’est l’absence du peintre. Il s’est effacé, laissant les choses parler d’elles-mêmes. Pas de démonstration de virtuosité, pas de discours, juste une écoute tendre de la vie devant lui. 
Une vraie leçon de méditation qui, comme le dit Fabrice Midal, "nous apprend à vivre avec un peu moins de soi et un peu plus de grandeur". 

Tout est là, mais il faut parfois un peintre pour diriger notre regard et la méditation pour ouvrir notre esprit.

Dominique Sauthier
Genève

jeudi 9 juin 2016

On ne peut pas tout faire

Le grand week-end de la Communauté est déjà bien loin. Il a été tellement riche que nous sommes certainement chacun reparti avec une petite perle, une phrase ou un mot qui nous a touché plus particulièrement,  et qui  brille encore quelque part au fond de notre cœur. 

Pour ma part, les pratiques de la confiance guidées par Fabrice Midal m’ont profondément touchées. 
Une phrase prononcée pendant une des pratiques m' a fait l’effet d’une flèche qui se plante dans une cible. Elle a résonné pendant longtemps, sans que je comprenne vraiment pourquoi « On ne peut pas tout faire » m’a tellement secouée. 

C’est en préparant la causerie pour la soirée de Genève de lundi dernier dont le thème était «Assumez sa solitude» que ce que je ressentais confusément s’est éclairé...
« On ne peut pas tout faire » montre la même limite que la solitude : il y a un endroit où  tout être humain est seul. Il y a un endroit où on ne peut plus faire avec l’autre, pour l’autre; il faut abandonner et faire confiance, même si c’est douloureux. C’est un peu comme lâcher la main d’un enfant encore hésitant quand il commence à marcher, ou ne pas retenir quelqu’un qui s’en va. 

Chacun doit, à un moment,  prendre le risque d’assumer seul son existence. 
« On ne peut pas tout faire » résonne finalement comme une libération de tout ce que je n’ai pas pu faire et de tout ce que je ne pourrai pas faire, pour laisser place à la confiance.

Dominique Sauthier
Genève

mardi 7 juin 2016

Les émotions ? Des pensées colorées.

Avant de connaître la méditation, j’étais persuadée que les émotions étaient d’un autre ordre que les pensées.

Si je n’ai jamais mis en doute que les pensées étaient mouvantes, pouvaient changer ou que je pouvais aussi me tromper, concernant les émotions c’était pour moi différent. Elles me semblaient vraies, intangibles, comme une autorité qui s’imposerait de l’extérieur  et m’envahirait, sous forme de tourment ou sous forme de transport...  J’étais à leur merci.

J’ai donc été très étonnée d’apprendre que, dans la perspective de la méditation, les émotions  sont considérées comme des pensées, ni plus ni moins - certes des pensées colorées, figurées plastiquement, avec des saillies et des creux, excitantes, pouvant déclencher frissons ou bouffées de chaleur - mais des pensées tout de même !

Et ce fut d’abord un grand soulagement de voir que méditer c’était d’entrer en relation avec elles au même titre qu’avec les pensées.
Entrer en relation signifie une multitude de choses et entre autres pouvoir travailler avec.
Travailler avec les émotions tel que nous le faisons dans la pratique ne les aplanit aucunement mais les rend plus intimement nôtres.

Dans le domaine de la pensée on admet facilement qu’il y a des “idées reçues”, des choses qu’on répète sans vraiment savoir ce qu’on en pense, sans en avoir vérifié la validité à partir de son expérience.  Mais dans le domaine des émotions peut-il y avoir des “émotions reçues”?
La réponse est oui et ce fut mon deuxième étonnement...
Cela voulait dire que je pouvais me tromper d’émotion ? Et  qu’il y avait des émotions préfabriquées, pré-cuites, prêtes à être réchauffées ? Quelle dédramatisation, quel soulagement !  Pratiquer consiste alors à affiner entre émotion juste, émotion éprouvée, émotion reçue  ……

Je retrouve une belle phrase de Fabrice Midal dans mon cahier d'écolière : “ Par la méditation nous allons nous ouvrir de plus en plus à l’insondable de nos émotions , à l’énigme de nos émotions.
Enigme, du grec ‘ainigma’: la parole obscure.
Souvent, les “émotions reçues“ ne sont pas de l’ordre de l’énigme.

Que l’énigme me soit repère.

Elisabeth Larivière  
Paris




lundi 6 juin 2016

Donnez un appareil photo à un enfant de quatre ans et il vous montrera un arbre.

Souvent je le regarde, cet arbre. Il m’inspire et me parle de la posture du méditant. Ses racines sont solides et humbles, son tronc s’érige dans une tranquillité parfaite et ses branches emplissent l’espace sans excuse.
 
Cette photographie a été prise par un enfant de quatre ans au séminaire “ La Beauté Sauvera le Monde ” mené par Fabrice Midal en 2007. 

Elle me rappelle que pour voir vraiment la beauté de chaque chose qui nous entoure, il faut avoir gardé un peu de cette fraîcheur spontanée de l’enfance.

Pratiquer la méditation aide à retrouver un rapport simple et non fabriqué aux choses.
J’apprends à écouter ce qu’elles me disent dans leur langage propre, sans rien y ajouter.
Le « moi-moi-même-et-encore-moi » s’efface et le monde apparaît.

Puissions-nous ne jamais être coupés de la Beauté !

Marine Manouvrier
Bruxelles

samedi 4 juin 2016

Entrer dans l'espace où rien n'est séparé

Francisco Varéla. Source Mind&Life Institute.
« Tout esprit s'éveille dans un monde. Nous n'avons pas conçu notre monde. Nous nous trouvons simplement en lui ; nous nous éveillons à la fois à nous-mêmes et au monde que nous habitons (…) Nous nous trouvons donc dans un cercle. Pour le philosophe français Maurice Merleau-Ponty, la reconnaissance de ce cercle ouvrait un espace entre le soi et le monde, entre l'intérieur et l'extérieur (…) Le caractère ouvert de cet espace révélait une voie moyenne, un entre-deux ».

C'est cet entre-deux qui s’ouvre à nous lorsque nous pratiquons la méditation. 

La séparation entre moi et le monde nous apparaît alors comme une donnée artificielle, construite par l'homme dans l'espoir de maitriser son rapport aux choses. 

L'auteur de cette citation, FranciscoVarela, était un neuroscientifique, directeur de recherche au CNRS, mais également un grand pratiquant. Tout au long de son existence, il a essayé de démontrer, par l'intermédiaire de la phénoménologie et des sciences cognitives notamment, comment l'expérience humaine devait revenir au premier plan de l'analyse scientifique.
En s'appuyant sur l'expérience méditative, il a pu mettre en lumière l'existence d'une non séparation entre corps et esprit - voir son ouvrage fameux « L'inscription corporelle de l'esprit » - mais également d’une ouverture primordiale redécouverte par tous les pratiquants. 

Mathieu Brégegère
Paris

jeudi 2 juin 2016

S'ouvrir à la mélodie secrète

Pratiquer la méditation, c’est s’ouvrir à la mélodie secrète de nos perceptions. Mille choses qui nous sont habituellement cachées se révèlent durant la pratique mais aussi hors de la pratique. Le monde dans lequel nous vivons nous apparaît plus brillamment et dans son infinie richesse. 

Ce ne sont plus tant les choses qui attirent notre attention que la constellation des rapports entre ces choses que nous explorons. 

Au centre de cet étoilement, il y a notre être et nous constatons que nous sommes, nous aussi, en rapport avec cette harmonie du monde au sein duquel tout se répond. 

Il y a une question à laquelle nous invite alors la pratique: comment sommes-nous accordés au monde ? S’entrainer à cette question mène progressivement à un sentiment de réunification avec le monde, dans sa splendeur et son entièreté. 

Méditer, c’est voir par où nous sommes accordés au monde.

Marine Manouvrier
Bruxelles

mercredi 1 juin 2016

Ce matin

Ce matin, j’ai jeté un œil distrait par la fenêtre de la cuisine, sur les acacias qui bordent la route. 

Et ce matin, mon regard s’est arrêté. 
Le Matin était là, qui me regardait : brillant et doux, Aurore aux doigts de rose. 
La vie est ainsi. On cherche, et on ne trouve rien. 

Mais parfois, elle fait un cadeau, elle nous envoie un messager.  
Ce matin, c’était le Matin. 

Peut-être que méditer nous apprend juste à reconnaître  le Matin quand il se présente à notre fenêtre. 
Dominique Sauthier
Genève