mardi 31 mai 2016

Le but des repas est de manger

Les éditions Belfond publient 4 jolis livres regroupant des citations et des enseignements courts du grand maître de méditation Thich Nhat Hanh : Manger, S'asseoir, Marcher, Aimer.

Ces livres, illustrés avec sobriété et élégance, nous ramènent à l'essentiel : 
faire ce que nous faisons au moment où nous le faisons, dans la plus pure tradition zen. 

Ainsi d'en le volume Manger, Thich Nhat Hanh raconte :

Il y a quelques années, j'ai demandé à des enfants "Quel est le but du petit-déjeuner ?" Un garçon a répondu "Prendre des forces pour la journée." Un autre a dit "Le but du petit déjeuner est de prendre un petit-déjeuner." Je crois que le second enfant a raison plus que le premier. Le but des repas est de manger.

Dans le style simple et profondément bienveillant qui le caractérise, Thich Nhat Hanh nous rappelle qu'il n'est point besoin de trouver une utilité à tout, un but à tout, des objectifs à tout. 
Manger pour manger. S'asseoir pour s'asseoir. Marcher pour marcher. Et Aimer pour aimer.


Marie-Laurence Cattoire
Paris

lundi 30 mai 2016

Chaque expérience est unique, chaque session de méditation aussi.

Avant tout, l’expérience de chacun est unique. Nous sommes des êtres humains, et aucun n’est semblable à un autre, bien que nous puissions trouver beaucoup de points communs à tous. Néanmoins chacun est singulier. 

Par exemple des frères et sœurs qui ont les mêmes parents et les mêmes conditions de vie peuvent ressentir les choses différemment.

Notre expérience est différente à chaque moment. Pendant la méditation, il est possible qu’on se sente bien en commençant, puis soudain une mouche tourne autour de nous et nous agace, puis nous sommes traversés par la tristesse l’instant d’après, etc.

Notre expérience est également différente d’un jour à l’autre. 
Selon les jours, nous nous sentons d’humeur joyeuse ou maussade au réveil, sans toujours savoir pourquoi. 

Méditer, c'est découvrir et accueillir cela plutôt que de le subir sans même s'en rendre compte.
 
Extrait de l’ouvrage Méditer avec les enfants Livre de Poche

Clarisse Gardet
Paris

samedi 28 mai 2016

Le plaisir des pauses

Photo Pablo Guerra.
On participe à un stage de méditation pour apprendre à méditer, pour approfondir sa compréhension des enseignements, pour poser des questions aux intervenants, pour faire ajuster sa posture... 

Et puis à un moment arrive la pause thé... 

Et là, tout le cœur à l'ouvrage que nous avons mis à méditer sur le coussin ou sur la chaise, tout le sérieux dont nous avons fait preuve, la patience que nous avons sagement développée.. tout cela retombe comme une fine pluie de gouttelettes et laisse place à une étonnante ouverture aux autres. 

A chaque pause-thé, je suis surprise par l'ouverture des visages, des regards, des sourires, la saine curiosité qui nous pousse vers l'autre, cette envie de rencontrer, de découvrir... 

Cette fraîcheur  - qui est un beau fruit de ces moments de pratique - nous invite à voir les autres avec des yeux tout neufs : nous percevons mieux les expressions, les paroles, les gestes, tout devient plus aimable, plus réel et plus honnête aussi. 

Plus la peine de faire semblant, de tenir une posture sociale, juste le plaisir de partager une tasse de thé, un conseil de lecture, une expérience de pratique. 

Cela fait partie du bonheur des stages et des journées de méditation : redonner un autre goût, subtil, tendre, délicat, à chaque moment partagé ensemble.


Marie-Laurence Cattoire
Paris

jeudi 26 mai 2016

Chaque minute comme un miracle

"Il n'y a qu'un seul monde, le monde qui se presse contre vous en cette minute même. Il n'y a qu'une seule minute pour être en vie, cette minute, ici et maintenant. La seule façon de vivre, c'est d'accepter chaque minute comme un miracle qui ne se répétera plus."

Bouleversante citation de Storm Jameson, auteure et journaliste anglaise née à la fin du 19ème siècle et qui a écrit plus d'une cinquantaine d'ouvrages. 

Quelle meilleure définition que celle-ci pour réaliser là maintenant, sans délai, combien la vie humaine est précieuse ? 

Méditer nous apprend à réaliser que notre vie est contenue dans chacune de ces miraculeuses petites minutes qui nous sont offertes et ne reviendront plus.

Marie-Laurence Cattoire
Paris

mercredi 25 mai 2016

Se libérer de l’espoir et de la peur

Photo @ Claire Cocano
La méditation offre la possibilité à l’être humain qui la pratique de trouver un ancrage dans son existence. Il décide à un moment de sa vie qu’il va méditer, sans en attendre un quelconque bénéfice, simplement parce qu’il ressent un appel à trouver une voie qui unifierait son expérience du monde. Au rythme de sa pratique, le prisme au travers lequel il envisageait le monde s’érode et il apprend à voir les choses telles qu’elles sont.

Sa manière d’agir dans le monde va aussi radicalement se modifier car le jeu de l’espoir et de la peur ne conditionnera doucement plus son action. Être conditionné par l’espoir et la peur c’est s’assurer d’agir d’une manière qui n’est jamais réellement en rapport avec la situation qui se présente. L’action est jaugée et calculée en fonction du paramètre coût/bénéfice. 

Comment habiter un monde où chaque être humain agit selon ce paramètre ?

Celui qui pratique la méditation se familiarise avec une pensée qui le sort radicalement du "moi-moi-même-et-encore-moi". 

Ainsi, la découverte du lien intime entre un être et tout ce qui constitue le monde dans lequel il existe l’oblige, par une justice interne, à se comporter à hauteur d’homme, c’est-à-dire avec dignité.


Marine Manouvrier
Bruxelles

lundi 23 mai 2016

Se familiariser avec son expérience

« L’important c’est que, quelle que puisse être la chose qu’on cherche à apprendre, il est nécessaire que ce soit par une expérience de première main : expérience personnelle et directe. » Chögyam Trungpa, Méditation et Action

La façon d’enseigner la méditation est différente de celle du savoir scolaire dont les enfants ont l’habitude. L’expérience est la base de l’apprentissage, même si l’acquisition de notions théoriques est indispensable. La pratique de la présence attentive éduque à l’observation des phénomènes, tels qu’ils se présentent, sans préjuger de ce que l’on va découvrir.
Par conséquent, il est capital que les enfants comprennent qu’en méditant ils vont s’exercer à réaliser une expérience d’un type particulier, et apprendre à la considérer avec confiance. Il est possible de le leur expliquer d’une façon ludique, adaptée à leurs capacités de compréhension.
 
Par exemple, je leur propose alors de faire ensemble une expérience.
 
Je leur montre un bouchon de liège que j’ai préparé. Je les interpelle : « Si je vous affirme que ce bouchon flotte dans l’eau, est-ce que vous me croyez ? »
Je leur propose alors de vérifier ensemble si c’est « vrai ».
Nous remplissons un verre d’eau, posons le bouchon à la surface : il flotte.
Nous pouvons donc constater par nous-mêmes qu’il est bien vrai qu’un bouchon flotte dans l’eau, car le phénomène s’est produit devant nous.
Le parallèle avec la démarche expérimentale de la méditation peut être fait : durant la pratique nous observons ce qui se passe, comme cela vient spontanément, sans savoir à l’avance ce qui va se montrer ni comment cela va se produire.

Extrait de l’ouvrage Méditer avec les enfants Livre de Poche

Clarisse Gardet
Paris

mardi 17 mai 2016

Méditer : une réponse qui s'accorde entièrement à notre temps

Installation de la salle de pratique au +Palais Brongniart 
Le grand week-end de l’école occidentale de méditation pour fêter les dix ans de son existence vient de se terminer. Ce fut événement marquant ; par l’ampleur du lieu qui nous a accueilli pendant ces deux journées tout d’abord mais aussi et surtout par le retentissement symbolique qu’il a eu sur mon existence.

En effet, il m’est apparu plus clairement comment le fait de pratiquer la méditation était la réponse la plus appropriée aux nombreux défis de notre temps. Je suis appelé depuis mon adolescence par un désir ardent de m’engager pour améliorer le sort de mes semblables. Pendant longtemps, j’ai cru que cela passerait par l’engagement dans des mouvements contestataires classiques : je voulais faire la révolution.

Au fil du temps, j’ai vu comment la lutte des classes ne s’accordait plus à la réalité de l’espace dans lequel nous vivions. C’est là notamment que j’ai rencontré la pratique de la méditation. Elle a eu un impact sans précédents sur la manière dont j’entrais en rapport avec moi-même, avec les autres mais aussi avec le monde. Peu à peu, j’ai pu prendre toute la mesure de la transformation existentielle que m’a permis d’opérer la pratique méditative.  

Fabrice Midal parle d' « une révolution concrète ». Cela décrit bien le phénomène. Je me suis rendu compte comment jusque là, je rêvais les yeux ouverts. Mon action était soutenue par un idéal abstrait qui n’avait plus de prises avec notre époque. 
  
Après ce grand weekend, je voix d’autant mieux comment cette « révolution concrète » passe par l’expérimentation directe et quotidienne de trois pratiques : la présence attentive, la bienveillance aimante et la confiance. Trois réponses originales qui s’accordent au « Chaosmos » qu’est notre temps, pour reprendre l’expression du poète Irlandais James Joyce, cité par  Hadrien France-Lanord ce dimanche.

Je n’ai plus aucune hésitation à dire qu’aujourd’hui, je souhaite consacrer ma vie à éprouver ces trois pratiques et à les transmettre au plus grand nombre : j’ai trouvé mon chemin et je suis convaincu qu’en m’y engageant entièrement ma vie pourrait devenir une œuvre. 

Mathieu Brégegère
Paris

jeudi 12 mai 2016

La qualité du silence

Lors des sessions de méditation en groupe je suis souvent très impressionnée par la qualité de silence qui y règne. 

Bien souvent, c’est un silence palpable et en même temps différent à chaque fois. 

Nous sommes rassemblés, tenus et par la posture et par le silence. 

Cette situation m’apparaît comme extraordinairement belle.

Dans quelques jours nous serons très nombreux, entre trois cent cinquante et quatre cents à nous poser, à écouter nos respirations.

De quoi sera fait le silence ? 

J’ai hâte d’y être …
      
Elisabeth Larivière
Paris

mercredi 11 mai 2016

La cohésion d'une salle de concert

Méditer ensemble, le paradoxe par excellence. S'appliquer en commun à quelque chose d'unique, de profondément intime, partager ce qu'on ne peut soi-même, tout en le vivant, qu'à peine envisager : être. 

Être de cœur et de simplicité, comme autant de fleurs poussant chacune sa couleur au milieu d'un champ de mai.
 
Assis ensemble d'une même façon – chacun dans son corps particulier, et par là atteindre à sa propre intégrité, saluée silencieusement par celle des autres. Porté par leur présence, sur le fil du souffle, être en prise avec son esprit – danseur immobile au bal de la tendresse et de la clarté.
 
Chacun ici est ce qu'il lui plaît d'être à ce moment précis, sans en être ni l'auteur ni la dupe. Le résultat attendu devrait être une belle cacophonie – il se situe à l'inverse du côté de l'harmonie. Une salle de méditants dégage la rare cohésion d'une salle de concert où, autour d'une musique, public et orchestre communient.
 
Si l'on se penche un instant sur le pourquoi de cette magie, on s'aperçoit combien la méditation unifie. Elle rassemble le corps-esprit, éveillant en nous l'humanité fragmentée et assoupie. Et cette humanité – singulière, manifeste dans sa puissante vulnérabilité – se trouve d'emblée unie à celle d'autrui. 

Avez-vous déjà porté l'oreille vers les bois après l'averse d'été ? Un premier oiseau démarre ses trilles, bientôt rejoint par toutes les voix ailées de la forêt. 

Ainsi va la pratique. Présence on ne peut plus solitaire – et par là même en lien avec tous dans la célébration de l'unique passage de la vie.

Yves Dallavalle

Ma première fois...

Je me souviens de la première fois où je suis arrivé dans l’Ecole Occidentale de Méditation. C’était lors d’un week-end consacré aux pratiques de bienveillance aimante à Genève.

Après avoir lu quelques livres sur la méditation, j'essayais depuis plusieurs mois de pratiquer seul dans ma chambre. Avant de participer à ce week-end, je croyais que la pratique était d’abord un travail intérieur, une expérience personnelle, un travail sur moi-même...

Quand je suis arrivé dans la salle où avait lieu ce week-end, je me souviens avoir été très impressionné en voyant plus de cinquante personnes assises sur des coussins de méditation. C’était un premier choc... d’autres personnes que moi pratiquaient la méditation... Je n’étais pas seul...

A  cette occasion, Fabrice Midal a transmis plusieurs pratiques de bienveillance aimante parmi lesquelles une où il s’agissait d’ouvrir son cœur en y incluant d’abord les personnes présentes dans la salle, puis d’élargir progressivement, encore et encore...

Cette pratique m’a complétement enthousiasmé. En la faisant, j’ai découvert que la méditation n’avait rien d'un travail « intérieur » ou « personnel » mais était d’abord une manière de s’ouvrir au monde et de toucher le lien profond qui nous relie aux autres. Ce jour là, j'ai découvert que mon cœur était ouvert et que je pouvais apprendre à le laisser rayonner.

Ainsi, faire ces pratiques à plusieurs, entouré par de nombreuses personnes qui pratiquent également, m’a montré de manière très directe l’ampleur de la bienveillance.

Guillaume Vianin
Neuchâtel

mardi 10 mai 2016

Méditer en seul ou en groupe ?

A chaque session de pratique à Bruxelles, au moins un participant me chuchote à l’oreille que "quand-même, en groupe, c’est autre chose que tout seul ! ».

Et c’est vrai, l’expérience de la pratique est bien différente si nous sommes seuls que si nous pouvons la partager avec des compagnons sur la voie de la méditation. 

La pratique en groupe nous porte, elle nous encourage. Lorsque nous sommes prêts à céder et voudrions sauter hors du coussin comme un clown de sa boîte ou encore nous laisser aller, nous savons que les pratiquants autour de nous traversent sans doute toutes sortes de choses mais restent dans la posture vaillamment. 
Alors nous revenons au souffle et nous gardons le cap, sur le même bateau.

Sans trop savoir pourquoi une certaine complicité pudique s’instaure entre les pratiquants, nous sommes reliés par la pratique. 

Revenus chez nous, nous gardons l’expérience de ce courage et cela donne souvent un nouveau souffle à notre pratique.

Peut-être que cette phrase de Rûmi dit quelque chose de cet ordre: "Vous n'êtes pas une goutte d'eau dans l'océan, mais tout l'océan dans une seule goutte d'eau. »


Marine Manouvrier
Bruxelles 
Prochaine occasion de méditer en groupe dans le cadre de l'Ecole occidentale de méditation  : c'est ici.

lundi 9 mai 2016

La bienveillance, invitée d’honneur.

Lumière dorée sur le stupa, en Normandie.
La bienveillance a été l’invitée d’honneur lors du dernier stage de l’Ecole qui s’est clôt le 28 avril dernier. D’abord discrète, elle s’est progressivement montrée comme une belle évidence. Elle était là, dans la disposition souriante des participants à tenter pleinement l’aventure, aventure dont l’exigence a réveillé le courage et montré la nécessité d’une douceur accrue envers soi.  Elle a tissé d’un fil d’or les enseignements, montrant que la pratique de la méditation, quand on lâche enfin les exigences que nous nous imposons pour un bien ou un mieux idéalisé ouvre un espace de clarté et de chaleur où nous nous sentons pleinement vivants, comme réconciliés, « contemporains de soi-même » comme le dit Rilke. Et finalement, nous avons ensemble déployé la bienveillance dans toute sa puissance pour baigner le monde entier de sa lumière dorée.
Que cette lumière dorée, que cette bienveillance puisse continuer à adoucir notre regard, attendrir nos coeurs et amener toujours davantage de paix et d’amour dans nos vies et autour de nous.

Dominique Sauthier
Genève

samedi 7 mai 2016

La raison d'être

Charles Ferdinand Ramuz, "L'être de chair".
Dernièrement, je suis tombé sur cette petite pépite dans le manifeste « La raison d’être » écrit par le poète Suisse Charles Ferdinand Ramuz. Quelle formidable description du geste qu’est la pratique de la méditation...

« C’est quand on s’y attendait le moins que la délivrance est venue. Il a fallu que tout un long et long travail intérieur se fit d’abord, peut-être à notre insu. Il a fallu d’abord qu’on descendit en soi, jusqu’à l’élémentaire, au commencement ou recommencement de tout. Il a fallu qu’on laissât tomber de soi tout ce qui était règle, tout ce qui était enseignement, tout ce qui était vielle tradition, tout ce qui était théorie. Il n’y a plus eu que l’être de chair. Un être qui ne savait plus rien, qui ne comprenait plus rien à rien, mais ses sens lui restait, avec des yeux pour voir, des oreilles pour entendre, et finalement, il s’est trouvé riche de son appauvrissement même, parce que tout au fond de lui, il y avait toujours la terre, et que, de descente en descente, il finit par y toucher. »

Je crois que tout est dit, que l’invitation que nous fait le poète est suffisamment explicite, redevenons, nous aussi, des « êtres de chair »... 

Guillaume Vianin
Neuchâtel

dimanche 1 mai 2016

Brise de mer

Ce balancement de chamelier bercé par le désert. Ce miroir dehors. Ce déroulement  – ce soulèvement au centre (semblable à l'imperceptible main d'un voleur qui nous soulagerait des alarmes), cette cadence venue du fond des âges, sûre de son irrésistible lenteur – est-ce le souffle ?
 
Rafraîchissant le palais, vivifiant la gorge, écartant les côtes, gonflant le ventre – puis au ressac lissant les chairs, délassant les muscles, lustrant la peau – est-ce le souffle encore ou bien la mer ?

La mer inlassable œuvrant en nous comme dans un coquillage – une fois reconnus libres d'agitement sur la terre.
 
Sur le mât de la colonne, ce seraient nos poumons cette voile levée par la brise de mer ?
 
Et lorsque j'expire comme la mer se retire – pour mieux revenir, mieux repartir – comment cela finit-il  ?

Cette présence sur les ailes du souffle – ce rayon d'air et de chair – à la destinée de caresse de quel côté du rivage se tient-elle, pour nous laver ainsi de son immensité – et du chant indomptable de sa lame ?


Yves Dallavalle
Chapendu